«Parler, si on le faisait vraiment, ce serait donner tous ses trésors,
les brader en fait car personne n'écoute, ce serait accepter de perdre
quelque chose de sa substance, perte définitive si l'on sait que nul
n'est là pour recueillir et transformer la perte en or.»
«Il importe d'aller vers le monde, dit Ajoupa-Bouillon, à
condition de pouvoir s'en retrancher au premier symptôme d'ennui,
au premier désir de solitude, au premier appel du monologue
intérieur qui murmure tout bas en nous : assez !»
«Jeunes belles disparues, car toutes vous disparaissez trop vite,
vous qui consolez de la laideur des hommes et êtes les seuls sujets
vivants qui puissiez rivaliser avec la splendeur des choses quand le
monde n'était habité que par des êtres sans paroles, sans méchanceté,
demeurez comme objets dans la malle aux trésors jusqu'à la
consommation des siècles et sans amen !»
Maurice Mourier
Cette ode à la sensualité redoublée et au passage du corps
qui dit encore à la volupté douloureusement féroce hausse
l'écrit à un niveau autre que le sacré.
Traversant librement l'espace qui chuinte entre l'avenir
et le passé, Ajoupa-Bouillon - cette beauté impardonnable
- évolue en une paradisiaque apesanteur sertie de révolte
pure. S'y opposent notre impossibilité d'être, notre absence
de démesure et le savoir de l'éternité tronquée. Heurts violents
qui nous plongent au coeur même du sens de l'amour et de sa
folie salvatrice, parfois.
Samuel Tastet