Cette étude porte sur la place et la fonction qu'a occupées la Poupée dans la vie et l'œuvre de Hans Bellmer. Cet objet-enfance a été choisi comme paradigme de recherche afin d'explorer les processus de création et certaines thématiques adjacentes telles que le regard, l'inquiétante étrangeté, la mémoire, les traces, l'image du corps, l'enfant et le créer, le sexuel, le fantasme ainsi que la perversion (et particulièrement les rapports perversion/création). Ainsi, sont analysés les processus psychiques en jeu dans ce que l'auteur a proposé de nommer le faire-œuvre perversif, mouvement psychique qui engage le sujet sur les bords, d'où l'idée d'un appareil psychique «en crise».
La Poupée - autrement appelée sa «fille artificielle» - fut conçue par Bellmer peu de temps après qu'il eut assisté à une représentation des Contes d'Hoffmann mettant en scène Olympia, une poupée-automate «qui n'est que belle». Bellmer tomba sous le charme de cette poupée (moment de sidération par l'image) et dès lors entreprit la construction d'une Poupée, véritable mécanique articulée dont le corps fut remanié - déconstruit et reconstruit - réinventant ainsi une autre réalité corporelle plus proche de l'image du corps morcelé telle qu'on la retrouve chez le psychotique où le dedans et le dehors ne sont plus distincts mais confondus (modèle de la bande de Mœbius qui n'a qu'une surface, qu'un seul bord). Par le biais de la Poupée, bricolée par son désir. Bellmer interroge l'anatomie féminine et tente d'en comprendre le fonctionnement. C'est un corps physiologique, organique, imaginaire et fantasmatique qui est exploré dans cette œuvre souvent qualifiée de perverse.