L'invention
de la piraterie en France au Moyen Âge
À la fin du Moyen Âge, après des siècles d'abandon du lexique maritime antique, les mots d'une nouvelle accusation pénale - le crime de piraterie des Latins - réapparaissent dans les archives. Peu à peu, le lexique médiéval des « larrons de mer » se retire des rivages, tandis que s'avance le pirate : au seuil de la modernité, la France réinvente son criminel en mer. Cette mécanique fut avant tout atlantique et royale : une invention, ou découverte, de la piraterie, telle une relique sainte du passé romain qui serait remontée à la surface avant d'être exploitée par les Valois pour ses vertus pénales. Cette épiphanie médiévale du pirate français est remarquable en ce qu'elle scrute l'obéissance des gens de mer, ainsi mis en sujétion par une inflexion profonde de la doctrine pénale. Le royaume de France, devenu au XVe siècle une puissance maritime, livre ainsi un nouveau récit des navigations, dans lequel pirates et rois se combattent, pour mieux transformer le statut de ses frontières atlantiques.