L'insurrection imprévue de février 1848 a fait naître une République.
Mais que recouvre exactement le mot ?
Loin de s'enfermer dans des discussions savantes, cette question
fait l'objet de débats publics, de manifestations et d'affrontements,
en particulier dans les rues de Paris. Deux conceptions opposées de
la République se constituent. D'un côté, la République modérée,
défendue par la majorité du Gouvernement provisoire puis de
l'Assemblée nationale, selon laquelle la République se résume dans
l'élection au suffrage «universel» (les femmes en restent exclues).
D'un autre côté, la République démocratique et sociale, qui rallie
des membres de clubs, des ouvriers, de simples citoyens, pour
lesquels la République n'a de sens que si elle permet au peuple de
participer directement aux affaires publiques, de garder le contrôle sur
ses représentants et d'assurer l'émancipation des travailleurs.
L'échec de l'insurrection de juin permet le triomphe de la République
modérée et des institutions du gouvernement représentatif, mais la
République démocratique et sociale se maintient, comme horizon révolutionnaire,
au sein du mouvement ouvrier naissant.
En retrouvant les discours et les controverses sur le sens de la citoyenneté
et de la représentation, cette plongée dans le printemps 1848 laisse
entrevoir la possibilité d'une République émancipatrice, non advenue
mais dont la puissance révolutionnaire est toujours actuelle.