L’année 1913 est le moment où la culture européenne, à son sommet, semble suspendue au bord de l’abîme. Revenir sur le paysage intellectuel et artistique de 1913 nous permettra-t-il de mieux nous orienter aujourd’hui ? C’est le pari qui est le nôtre. Il s’agit de comprendre ce qui a fécondé le XXe siècle, mais aussi ce qui lui a manqué, ce qui a été perdu pendant les apocalypses et les glaciations qui ont suivi. De quels espoirs, de quelles illusions, de quelles révoltes cette génération fut-elle porteuse ?
Les années qui ont précédé la guerre sont un prodigieux laboratoire de formes nouvelles, aussi voit-on souvent 1913 comme l’origine de cette modernité esthétique revendiquée par les avant-gardes. Nous avons cherché, pour notre part, à montrer la richesse et les tensions de cette année-là. L’Homme sans qualités de Musil incarne « un homme du possible » qui traite la réalité comme « une tâche et une invention perpétuelles ». C’était en 1913 : quels sont nos possibles aujourd’hui ?