Le grand prix de littérature coloniale 1921-1938 : lauréats, jugements, controverses
Tome II : 1930-1938
Fondé en 1920 par le ministre des Colonies Albert Sarraut et pré-datant les grands ouvrages de théorie et d'histoire de la littérature coloniale de Marius-Ary Leblond, Roland Lebel ou Eugène Pujarniscle, le Grand Prix de littérature coloniale (1921-1938) est le laboratoire où la doctrine et la politique de la littérature coloniale française s'élaborent. Attribué par un jury réunissant les écrivains « coloniaux » de tous bords - de Claude Farrère et Myriam Harry à Pierre Mille et Louis Bertrand - et quelques activistes et fonctionnaires coloniaux, le Grand Prix devient également l'objet autour duquel se cristallisent des débats, souvent échauffés, sur la définition de la littérature coloniale et son rôle social, sur les stratégies propagandistes et publicitaires à employer pour la faire connaître, ou encore les moyens les plus appropriés de sa diffusion à travers l'Empire.
Disséminés dans la presse et réunis pour la première fois au sein de ces volumes, les procès-verbaux des délibérations publiés par des membres du jury ainsi que les réactions et commentaires que suscite le choix de tel lauréat nous présentent la littérature coloniale fabriquée et consacrée par son Grand Prix comme un creuset de tensions et une source de controverses. Les questionnements et les doutes collectifs qui les provoquent nous tracent, en fin de compte, les cheminements de la quête identitaire d'un Empire colonial français récemment constitué.
« M. Sarraut a institué le prix de la littérature coloniale. Lettré, il a voulu que le jury fût composé en majeure partie d'écrivains et [...] il semble bien que ce soient les romanciers et les oeuvres d'imagination qu'on ait dessein de couronner. Le geste du ministre, s'il ne donne pas des chefs-d'oeuvre littéraires - pour cela les arrêtés ne suffisent point -, il aura du moins cette conséquence heureuse d'attirer l'attention des écrivains français sur nos colonies et de les engager à les visiter. C'est là l'essentiel. »
Jean Vignaud