Après 1955, l'année des deux Académies, la belge et la
française, 1956 et 1957 sont placées sous le signe des murs :
ceux d'une chapelle, à Villefranche-sur-Mer, et ceux d'une
mairie, à Menton. Cocteau dépense une énergie considérable
à ces tâches de fresquiste qui vont dévorer une grande partie
de son temps pendant ces deux années, mais il s'y consacre
avec une détermination sans faille malgré tous les obstacles
- et ils sont nombreux ! - qui vont se dresser sur son chemin.
Il tient d'ailleurs, à tort ou à raison, la chapelle Saint-Pierre
pour le «couronnement de [son] travail» et envisage
même d'écrire, parallèlement au Passé défini, «Le journal
de la chapelle», projet finalement abandonné, les nombreuses
notes prévues étant partiellement reprises dans le présent
volume. Avec le recul, nul doute que le poète aurait trouvé
excessive la relation détaillée des moindres difficultés, matérielles
ou psychologiques, qu'il rencontre : ses rapports
avec ses aides, ses différends dignes de Clochemerle avec les
pêcheurs, avec la municipalité ou avec les ecclésiastiques. Il
ne faudrait pourtant pas gommer d'un trait les innombrables
anecdotes qui émaillent le récit d'une genèse difficile,
complexe. Il conviendrait en revanche de déceler derrière les
mesquineries, les jalousies, les intérêts contrariés des uns et
des autres la détermination d'une conduite soucieuse de préserver
sa singularité, d'affirmer sa présence envers et contre
tout et tous.
«Ces notes, je les voudrais vivantes et aptes à jouer mon
rôle lorsque j'aurai quitté les planches.»