Au début des années cinquante, Rashômon révèle aux
Occidentaux l'importance du cinéma japonais. Le film
remporte coup sur coup le Lion d'or à Venise et un Oscar
à Hollywood. Son auteur, Akira Kurosawa, fondamentalement
attaché à la culture de son pays, est tout aussi féru de culture
classique occidentale. Il fait toute sa carrière au sein du système
des puissants studios japonais (Shochiku, Toho) comme
scénariste et surtout comme réalisateur, alternant les genres :
cinéma d'action (de La Légende du grand judo à Sanjuro),
grandes fresques historiques flamboyantes (Kagemusha, Ran),
films noirs (Chien enragé), drames contemporains intimistes
(Vivre) ou adaptations d'auteurs occidentaux (Shakespeare,
Gorki, Dostoïevski). Cinéaste comblé par le succès public
et la reconnaissance critique internationale, Kurosawa a
aujourd'hui encore une influence considérable, sur le western
par exemple, et Clint Eastwood confie volontiers que Yojimbo
est pour lui une source d'inspiration.
Son cinéma scrute l'écart entre la culture féodale traditionnelle,
fondée sur la négation de l'individu, et l'apprentissage de la
démocratie dans un monde corrompu par le pouvoir et l'excès
de l'affirmation de soi. Les contradictions du Japon moderne
sont la richesse de son oeuvre. Concilier l'esprit du Japon des
samouraïs et l'humanisme est la vertu majeure de son cinéma
dont la portée est vraiment universelle.