L'opposition entre amis et ennemis, amitié et haine est universelle mais elle se décline sous des formes très diverses selon les sociétés. Dans les sociétés occidentales qui se sont développées sur les ruines de l'Empire romain, la guerre et l'honneur d'un côté, le christianisme de l'autre, ont été des facteurs d'identité collective et de puissants marqueurs sociaux. Selon les cas, les historiens ont décrit des sociétés de face à face, des sociétés de vengeance, mettant l'accent sur la faiblesse des régulations étatiques, ou au contraire des sociétés fluidifiées par l'amitié entre les élites et l'amour divin. Culture de la haine, de la violence ou culture de l'amour et du pardon ? Sociétés prédatrices ou sociétés du don ? Ce livre refuse ces dichotomies réductrices, comme les oppositions genrées et sexualisées qui ont été introduites au XIXe siècle entre amour et amitié, sentiments (ou sensibilité) et relations, nature et culture. Conçu dans une perspective anthropologique et décentrée, il considère que la personne médiévale n'existe que par ses relations et ses identités multiples, superposables et interchangeables, avec les vivants et les morts, ici-bas et au-delà. Par une relecture des sources et des exemples concrets, le livre s'attache ainsi à faire comprendre comment les femmes et les hommes du haut Moyen Âge vivaient et exprimaient leurs relations affectives et comment ils pensaient leur monde.