Dans l'Antiquité, les anecdotes constituent, avec le discours technique, l'une des manières principales de parler de l'art. Cette perspective sera reprise à la Renaissance avec Giorgio Vasari, auteur des Vies d'artistes, et prédominera dans l'histoire de l'art jusqu'au XVIIIe siècle. Ainsi, les anecdotes fameuses, « Apelle et le cordonnier », « L'Hélène de Zeuxis », « La jeune fille de Corinthe », etc., inspireront les artistes comme les théoriciens de l'art.
Cet ouvrage porte sur les anecdotes relatives aux oeuvres et aux artistes - peintres, sculpteurs et, dans une moindre mesure, architectes -, présentes dans le vaste panorama des connaissances qu'est l'Histoire naturelle, écrite au Ier siècle de notre ère. Comment Pline l'Ancien s'approprie-t-il ce matériau important dans la littérature artistique grecque et l'intègre-t-il dans un discours ancré dans la Rome impériale, au service d'une certaine vision de la culture gréco-romaine ? Ces questions touchent à la fois à la réception de la culture grecque dans le monde romain, à la formation d'une identité culturelle romaine et à la constitution d'un discours sur l'art au sein d'une oeuvre à forte finalité morale et politique. Les anecdotes, appartenant pour la plupart au monde grec et reformulées à l'époque hellénistique puis romaine, sont recontextualisées par Pline dans la culture de son temps, mais alimentent aussi une image intemporelle des artistes qui a traversé les siècles jusqu'à nos jours.