« La déception et la surprise s'étaient évanouies du visage de Mme Vizy. Quelque chose d'agréable pointait, qui l'adoucissait. Elle continuait à examiner Anna, la bonne. Celle-ci n'avait même pas l'air d'une paysanne. Elle n'était pas aussi lourdaude, aussi joufflue qu'Orszi Varga. Elle était plutôt frêle, élancée, le visage ovale, l'ossature fine, bien proportionnée. Elle portait une petite robe fraîche à carreaux sous laquelle reposaient moelleusement, inconscientes, les deux petites balles en caoutchouc de sa poitrine d'enfant. Dans tout son être il y avait quelque chose d'inexprimable, quelque chose qui l'attirait, qui la retenait aussi un tantinet, mais qui l'intéressait prodigieusement. »
Budapest. Juillet 1919. Les « Rouges » de Béla Kun ont perdu. Une ère nouvelle débute pour la bourgeoisie. Seule Mme Vizy, la femme du haut fonctionnaire Kornél Vizy, est obsédée par tout autre chose : Anna, la gouvernante promise par le concierge. Jusqu'au jour où Anna, un couteau de cuisine à la main, commet l'innommable...
Depuis leur création, les Editions Viviane Hamy s'intéressent de près à la littérature de l'Est. Pour célébrer leurs trente ans, elles
vous proposent de lire et de relire l'oeuvre immense de Dezsö Kosztolányi, - une des plus grandes figures de la littérature hongroise du XXe siècle -, dont Anna la douce est sa création la plus célèbre.