Anthropologie du don
Le tiers paradigme
Marcel Mauss, neveu et héritier spirituel de Durkheim, initiateur de l'ethnologie scientifique française, est universellement connu comme un des grands noms de la tradition anthropologique. Aucune discussion sur le don, qu'il s'agisse du don pratiqué dans les sociétés archaïques ou du don des modernes, ne peut ignorer son célèbre Essai sur le don. Mais, pour Alain Caillé et les auteurs regroupés autour de la Revue du Mauss, si l'Essai est le texte le plus important de toute l'histoire des sciences sociales, c'est parce qu'il contient bien plus encore.
Même si Mauss, épris de concret, se méfiait des grandes théories, il y a dans son oeuvre, et plus spécifiquement dans l'Essai sur le don, les fondements d'une approche généraliste en sciences sociales qui concerne aussi bien la sociologie que l'économie, l'histoire ou la philosophie. Encore faut-il les rendre clairement visibles.
C'est à ce travail d'explicitation et de systématisation que s'attaque ce livre, qui s'attache notamment à montrer comment Mauss nous offre une pensée du rapport social irréductible aux paradigmes dominants et rivaux de l'individualisme et du holisme méthodologiques, un « tiers paradigme », le paradigme du don. Les bases d'une sociologie vraiment générale.
« Le don qui donne forme aux échanges et aux contrats n'a rien à voir avec la charité et le désintéressement. [...] Précisions encore : non seulement le don archaïque n'est pas la charité, l'altruisme, mais il n'est pas seulement le don ; il s'organise en fait selon ce que Mauss appelle une triple obligation de donner, recevoir et rendre. [...] Nous tentons [ici] d'expliciter les enjeux de la découverte de Mauss pour les sciences sociales. »
Alain Caillé, Dé-penser l'économique