« L'art ne vient pas se coucher dans les lits qu'on a faits pour lui », proclame Jean Dubuffet, l'homme qui est à l'origine de la notion d'« art brut ».
Sous ce terme, il regroupe les oeuvres réalisées par des non-professionnels, des créateurs sans culture artistique : pensionnaires d'asiles psychiatriques, autodidactes isolés ou peintres médiums à l'origine d'un art spontané et visionnaire.
Ce numéro de 303 s'intéresse aussi à d'autres formes d'art non conventionnel : l'art outsider, l'art modeste, hors-les-normes, en marge, singulier, naïf, populaire... Autant d'appellations qui élargissent l'entreprise historique de Dubuffet, autant d'invitations à partir à la rencontre de personnages hauts en couleur, qui inventent des formes esthétiques d'une extrême diversité.
Sous l'égide de Gaston Chaissac et de Robert Tatin, faux bruts et vrais sauvages savants, sont ici rassemblés de nombreux créateurs qui bousculent et cabrent les cadres culturels. Parmi eux, Chomo, Fleury-Joseph Crépin, Gaston Floquet, Daniel Johnston, Richard Greaves, Helene Reimann, Aimable Jayet, Madge Gill, Armand Goupil, Giovanni Bosco... La famille des habitants-paysagistes - celle du facteur Cheval et de Picassiette - n'est pas en reste, avec de surprenants « bâtisseurs de l'imaginaire » de la région des Pays de la Loire ou d'ailleurs : Fernand Chatelain, Bernard Roux, André Pailloux, Émile Taugourdeau, Jean-Pierre Schetz... Sans oublier quelques objets populaires véritablement extra-ordinaires », sortis de collections méconnues.
À travers différentes approches, des rencontres, des regards critiques, l'ensemble de ce numéro dévoile le dessein d'hommes et de femmes qui tous ont vécu l'art comme un espace de liberté absolu : le projet, intimement conçu, d'un enchantement du monde.