« - On peut pas faire confiance à un baptisé, batchka ; personne ne peut.
- Tu mens, crétin de sauvage ! Pourquoi ne pas faire confiance à un baptisé ? Un baptisé serait-il pire qu'un idolâtre ?
- Pourquoi pire ? Un homme est un homme.
- Tu vois, tu le dis toi-même, non ?
- Je sais pas, tu dis qu'il est pas pire, et moi je le dis aussi ; mais on peut pas lui faire confiance.
- Comment se fait-il donc ?
- C'est parce que le pope lui pardonne le péché, batchka.
- Quel mal y a-t-il à ça ? Vaut-il mieux rester sans pardon ?
- Rester sans pardon ? Impossible. Faut demander pardon.
- Je n'arrive pas à te comprendre. Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Ça batchka : un baptisé a volé, il va le dire au pope et le pope, batchka, va lui pardonner : pour ça, les gens le croiront plus.
- Arrête tes bêtises ! Donc, d'après toi, remettre le péché, ça ne vaut rien ?
- Non, chez nous, ça vaut rien.
- Comment faut-il faire, d'après vous ?
- Comme ça, batchka : ce que tu as volé, tu le rends au propriétaire et tu lui demandes pardon ; l'homme pardonne, et Dieu aussi pardonne.
- Mais le pope aussi est un homme. Alors pourquoi il ne peut pas pardonner ?
- Pourquoi il peut pas pardonner ? Le pope peut aussi. À celui qui a volé le pope, le pope peut pardonner, batchka.
- Mais s'il a volé quelqu'un d'autre, le pope ne peut pas lui pardonner ?
- Impossible, ça sera pas juste. On lui fera pas confiance. »