Quand mon frère et moi nous disons que pour faire un film à deux il faut que nous désirions faire le même film, il me semble que cela veut dire que tous les deux nous atteignons cet état où nous sommes hantés par les mêmes images lointaines qui s'éveillent en nous [...] dont nous ne parlons pas mais qui surgissent de notre enfance partagée. Ce ne sont pas des images mais plutôt des phantasmes, des bribes de scénario enfouis qui reviennent et nous attirent.
Qu'est-ce qu'un père, une mère, un fils, une fille ? Qu'est-ce qu'un individu qui ne serait ni père, ni mère, ni fils, ni fille ? Est-ce pensable ? Après le nazisme et le communisme réel qui voulurent remplacer le lien généalogique par la soumission au Maître ou au Parti et avec le consumérisme contemporain qui starifie l'individu sans lien, c'est une question qui n'est pas insignifiante.
" Indignez-vous ! " dit-il, " Indignez-vous ! " Le problème est que l'indignation est loin d'être libre de préjugés. Seule, elle est aveugle, prête à s'accoupler à n'importe quelle colère.
Comme les événements télévisuels, beaucoup de films sont mis en scène pour être filmés.
Le film Shoah de Claude Lanzmann empêchera peut-être que les humains des siècles à venir ne confondent Auschwitz avec Pompéi.
Londres pour une rétrospective de nos films. Un critique nous a dit : " En tant que spectateur de vos films, j'ai toujours le sentiment d'avoir raté quelque chose, d'être arrivé trop tard dans la salle. " Nous l'avons remercié pour ce compliment.
L. D.
Jean-Pierre et Luc Dardenne sont cinéastes. Ils ont obtenu deux fois la Palme d'or au festival de Cannes (en 1999 pour Rosetta, en 2005 pour L'Enfant). Luc Dardenne a publié, en 2005, Au dos de nos images I (1991-2005) et, en 2012, Sur l'affaire humaine au Seuil, dans " La Librairie du XXIe siècle ".