Augustin a mis au centre de sa pensée la notion de signum.
Être au monde, à soi, à autrui, à Dieu, c'est d'abord faire
face à des signes.
De façon aussi radicale qu'inédite, l'herméneutique se
trouve par là hissée au rang d'une condition permettant de
rendre compte de la totalité de rapports qui constituent
l'humain. Le «il y a», le «es gibt» propre à toute «donation»
phénoménale, consiste intégralement en une exposition
aux signes, faisant ainsi de l'humana conditio une
«condition herméneutique».
Et cela parce que le problème qui se pose continûment à
Augustin, et avec le plus de vigueur, est celui de l'accès à
la manifestation comme plénitude de l'apparaître. Or, c'est
le signe qui prévaut, dès lors que la chose même (res ipsa)
fait défaut, parce que seul il en ménage l'approche.
Dans cette tension fondamentale entre signification et
manifestation se trouve identifiée la trame profonde qui
régit toute la pensée augustinienne de l'humain, mais aussi
du phénomène. Ce qui est alors requis n'est autre qu'une
analytique de l'ego, permettant d'en dégager l'acte herméneutique
immanent comme jeu intime de la référence.
Car, du signe au manifeste, il y a non pas exclusion, mais
implication et renvoi : le signe ne signifie qu'en renvoyant
au manifeste - le manifeste ne se donne que dans ses signes.
Voué à l'apparaître, l'homme augustinien habite ce renvoi.
Il a en lui son instable et exigeante demeure.