Longtemps Clora a été une petite fille qui grandissait dans le silence de son père et les voix de la campagne solitaire autour d'elle. Un jour, Mademoiselle, l'institutrice du village, est venue la chercher pour l'emmener à l'école. Et le monde a paru s'ouvrir devant Clora. Pour mieux se refermer ensuite. A cœur de jour, à cœur de nuit passèrent les années. Clora a quinze ans.
«Quelque chose s'est alors décidé dans la campagne noyée de pluie, quelque chose de sourd et d'aveugle, de terriblement opaque, dont elle ne voyait ni le commencement ni la fin et qui la concernait. Cet été-là, alors que c'était la guerre dans les vieux pays, Clora s'est mise à surveiller par la fenêtre la montée de la rivière devant sa maison, comme on épie, du coin de l'œil, le lait qui bout sur le feu.»
Le Lieutenant anglais surgit alors, «échappé» de l'enfer de Londres sous le blitz et la calme campagne de Clora n'a plus jamais été la même.
Anne Hébert a écrit une fable chatoyante où la terre et les hommes composent un hymne à la générosité des choses muettes. Dans son monde on se sent capté par la simple apparition du soleil à travers le feuillage d'un sous-bois. Capté, ébloui. Comme on l'est par la singulière et sensuelle Clora.