Comment transformons-nous notre vie en récit ? Pour le savoir,
et connaître la genèse d'une autobiographie, Philippe Lejeune
confronte le texte autobiographique à ses brouillons plutôt qu'à
la vie hors texte, plus difficile à saisir.
Suite des Brouillons de soi, ce volume prolonge dans trois directions
les explorations qui y ont été entreprises. D'abord, la recherche
d'un «art moyen» de l'autobiographie, dont Marie d'Agoult a
explicité les contraintes et les règles en 1865 dans un cahier préparatoire.
Ensuite, une visite à l'«atelier» de deux créateurs de
formes : Georges Perec avec les récits croisés de W ou le souvenir
d'enfance, Claude Mauriac avec la relecture labyrinthique de son
journal dans Le Temps immobile. Enfin, une réflexion anthropologique
à partir d'expériences dites «ordinaires» : comment une
enfant de sept ans (Ariane Grimm) apprend à maîtriser l'écriture
du temps et à se construire un rôle, base de toute expression autobiographique
à venir, et comment un vieil homme (Paul Léautaud)
peut intégrer une conversation ordinaire, enregistrée à son insu,
dans le flux mythologique de son journal. Le livre s'achève par
trois textes théoriques sur la forme «journal», tournée vers l'avenir,
autogenèse au jour le jour d'une vie qui, pour être authentique,
doit rester toujours à inventer.