La conquête carolingienne de l'ensemble des espaces germaniques à la fin
du VIIIe siècle a permis une nouvelle expansion du christianisme et de la
latinité à l'Est de l'Europe : les évêques y sont les premiers responsables
de la mise en place des structures d'encadrement et de pouvoir en liaison
étroite avec la royauté. Dans le cadre de la mission et de l'implantation de
nouvelles structures ecclésiastiques, ils transforment l'organisation de l'espace
en créant des cités épiscopales là où aucune ville romaine n'avait jamais existé et
développent des pôles de sacralité qui sont autant d'accroches de leur pouvoir.
Ce nouveau monde est à conquérir en profondeur et la mission demeure
un impératif tant politique que religieux : la rencontre des païens, à la fois
recherchée et redoutée, est l'occasion de mieux définir les contours de la
société chrétienne. Dans l'empire ottonien des Xe-XIe siècles les marches du
monde germanique pénètrent profondément en territoire slave et les processus
d'acculturation des élites, notamment polonaises et tchèques, mais aussi
hongroises, permettent le développement de nouvelles structures politiques
et l'essor d'une nouvelle chrétienté : on observe ici la formation de sociétés de
la frontière où les processus d'acculturation et les interactions sociales ne sont
jamais à sens unique.
Ancienne élève de l'ENS Saint-Cloud et agrégée d'Histoire, Geneviève Bührer-Thierry est
professeur d'Histoire du Moyen Âge à l'université Paris-Est Marne-la-Vallée, directrice
du laboratoire «Analyse Comparée des Pouvoirs» et co-directrïce de la publication de la
revue Médiévales.
Elle a notamment publié : Évêques et pouvoir dans le royaume de Germanie (876-973),
Paris, Picard, 1997, L'Europe carolingienne (714-888), Paris, A. Colin, 2010,
et avec Charles Mériaux, La France avant la France (481-888), Paris, Belin, 2010.