Pendant très longtemps, je me suis considéré comme un type d'un ennui mortel qui savait plutôt bien taper dans un ballon jusqu'à ce qu'il soit contraint d'arrêter sa carrière en raison d'une cheville foutue. Mon seul but, c'était de devenir le meilleur. Le meilleur au monde. Tout devait s'effacer devant cet objectif et je suis allé très loin dans cette quête.
Je vous convie à me suivre sur ce chemin vers les sommets les plus élevés. À suivre le petit garçon timide de six ans, formé dans la rue et, dix ans plus tard, à l'Ajax, au grand Ajax, comme remplaçant de l'immense Johan Cruyff pour mes débuts. Puis à Milan avec une Coupe des vainqueurs de coupe en poche et mon parcours décisif au sein de l'équipe des Pays-Bas à l'Euro 88.
En décembre 1992, j'avais été élu Ballon d'Or France Football pour la troisième fois (comme Cruyff ou Platini). J'avais remporté trois coupes d'Europe, inscrit les buts de la victoire dans deux finales, emporté la décision dans un tournoi majeur et marqué quatre fois contre l'IFK Göteborg. Personne n'avait jamais fait ça en Ligue des champions. On peut dire qu'il était impossible de faire mieux. Mais ma soif de reconnaissance n'était pas assouvie. La chute fut d'autant plus dure.
Juste avant Noël 1992, après avoir été opéré du mollet droit, mon monde s'est écroulé. Je n'allais plus jamais taper correctement dans un ballon, plus jamais entendre ce bruissement merveilleux du ballon au fond des filets adverses, je n'allais plus jamais hurler de bonheur comme un gamin après avoir marqué.
J'ai fait tout ce qui était possible pour retrouver la forme. Bien au delà des limites de la douleur. Mais c'était terminé. En vérité, à la fin, j'étais juste heureux de pouvoir marcher jusqu'à la boulangerie la plus proche. J'ai payé le prix fort. Et je n'en ai jamais vraiment parlé. Tout ce dont j'avais rêvé avait disparu. Je me suis caché pendant sept ans.
Ce n'est que récemment que j'ai réussi à me calmer. Pour la première fois, j'ai l'impression d'avoir une histoire à raconter. L'histoire que je n'ai jamais racontée. Dans laquelle je vais aussi pouvoir remettre les choses au point. Je n'épargnerai personne. Moi moins que quiconque. L'heure est venue.