Que cherchent les écrivains qui, au risque de passer sous
les radars médiatiques, n'empruntent pas l'autoroute du
récit linéaire et du reportage romancé ? La voie étroite
de la poésie débouche sur des formes minoritaires et
sur des consistances bizarres de prose. Comme s'il fallait
d'urgence ranimer, redessiner les mots en troublant leur
usage. Mais dans quel but, au juste ?
De temps à autre, on m'invite à exposer des idées. Mon
choix du sujet est toujours intéressé. Il concerne ce que
je pratique : la poésie et la prose narrative surtout, un
peu le montage et le dessin. Il s'agit de parler en s'adressant
à des gens en particulier. La dispute n'est jamais loin.
Le ton n'est pas toujours sérieux. Limité par le temps, je
procède quelquefois par simples assertions, qui se lisent
alors comme les têtes de chapitres manquants. Esquisses
d'une réflexion que d'autres prolongeraient, ces brefs
discours sont ensuite laissés en l'état.
Ils portent, donc, sur des inventions marginales : poèmes
prosaïques, visuels ou animés, récits digressifs ou hétérogènes,
figures de monstres, films dansants, fantômes
tracés. Ils suggèrent une certaine politique des formes.
Ils plaident pour une imagination technique assez négligée
- ou mal vue - en littérature.