Quels usages les classes populaires font-elles de l'informatique connectée ? De quelle manière les inégalités sociales cadrent-elles les pratiques numériques ? Comment ces pratiques influencent-elles, en retour, les existences des plus modestes ? Cet ouvrage entend apporter des réponses à ces questions et à quelques autres que la littérature en sciences sociales a souvent traitées sous les auspices de la "fracture numérique".
La perspective ici mobilisée se détourne néanmoins de ce type d'approches et fait sienne l'idée de logiques d'action qui empruntent à la fois aux propriétés sociales des acteurs et des contextes. Les usages des TNIC (technologies numériques d'information et de communication) tiennent à des compétences pratiques, ainsi qu'à des inclinations à agir, croire, penser, sentir, etc. qui, dans le cours de l'action, vont à la rencontre de la matérialité de l'informatique connectée qui est également sociale. Les TNIC équipent les existences populaires, leur donnent des moyens, mais elles peuvent aussi, par leur omniprésence, devenir des agencements dispositionnels et participer au maintien, au renforcement ou à l'infléchissement des parcours biographiques.
Depuis ce cadre général sont discutés différents aspects des "inégalités sociales- numériques" (e-exclusion, illectronisme, abandonnisme, inégalités algorithmiques, etc.) qui sont mis en regard des situations et des positions sociales de ceux qui les subissent. Cette pérégrination dans les pratiques populaires de l'informatique connectée permet également d'ouvrir un ensemble de réflexions connexes portant sur la notion de capital numérique, les processus de dématérialisation des services publics, ou encore, la place des émotions dans les mobilisations en ligne des Gilets jaunes.