Mme de Murat fait partie de ces conteuses éclipsées par
l'immense succès de leur contemporain, Charles Perrault.
Or la pratique littéraire de ces femmes, à la fin du
XVIIe siècle en France, constitue un véritable phénomène
social, fédérant le public mondain des salons autour du
conte de fées. Mais la comtesse de Murat avertit ses amies
écrivains : elles doivent être des «fées modernes», ne
s'occupant que de «grandes choses» et habitant des
«palais enchantés». Elle-même écrit une quinzaine de
contes, au moment où la mode du genre bat son plein, dans
les années 1698-1699. N'hésitant pas à varier ses sources
d'inspiration afin de renouveler le merveilleux, la conteuse
puise dans les grandes épopées et les romans à succès de
son époque. Et s'il lui arrive d'évoquer des thèmes
folkloriques, qu'elle emprunte à l'Italien Straparole, c'est
pour mieux s'en éloigner. Les contes de Mme de Murat
offrent en effet une certaine vision du «Grand Siècle», en
lien avec l'actualité et la féerie de Versailles. Ils sont
également l'occasion pour la comtesse, qui fut stigmatisée
en raison des «désordres» de sa vie, de distiller ici ou là, en
guise de morale, ses réflexions sur l'amour. C'est à la
lecture de ces histoires, qui constituent un véritable traité
des passions, qu'invite le présent ouvrage qui réunit pour la
première fois l'ensemble des contes de Mme de Murat.