Le libéralisme continue aujourd'hui d'exercer
une influence décisive sur la politique mondiale et de
jouir d'un crédit rarement remis en cause. Si les «travers»
de l'économie de marché peuvent à l'occasion
lui être imputés, les bienfaits de sa philosophie politique
semblent évidents. Il est généralement admis que
celle-ci relève d'un idéal universel réclamant l'émancipation
de tous. Or c'est une tout autre histoire que
nous raconte ici Domenico Losurdo, une histoire de
sang et de larmes, de meurtres et d'exploitation. Selon
lui, le libéralisme est, depuis ses origines, une idéologie
de classe au service d'un petit groupe d'hommes
blancs, intimement liée aux politiques les plus illibérales
qui soient : l'esclavage, le colonialisme, le génocide,
le racisme et le mépris du peuple.
Dans cette enquête historique magistrale qui couvre
trois siècles, du XVIIe au XXe, Losurdo analyse de manière
incisive l'oeuvre des principaux penseurs libéraux, tels
que Locke, Burke, Tocqueville, Constant, Bentham ou
Sieyès, et en révèle les contradictions internes. L'un
était possesseur d'esclaves, l'autre défendait l'extermination
des Indiens, un autre prônait l'enfermement et
l'exploitation des pauvres, un quatrième s'enthousiasmait
de l'écrasement des peuples colonisés... Assumer
l'héritage du libéralisme et dépasser ses clauses d'exclusion
est une tâche incontournable. Les mérites du
libéralisme sont trop importants et trop évidents pour
qu'on ait besoin de lui en attribuer d'autres, complètement
imaginaires.