La Corée du Nord est le pays le plus haï, mais aussi le plus mal connu
de la planète.
Comprendre les ressorts d'un système totalitaire sans équivalent
par son monolithisme idéologique, l'inscrire dans un espace et dans un
temps pour en saisir l'ancrage et décrypter le fonctionnement d'une
économie émergente, de facto de marché : tel est l'objet de ce livre.
La Corée du Nord est le fruit d'une histoire disputée : colonisée
par le Japon (1910-1945) puis divisée par les États-Unis et l'URSS en
1945, partition entérinée trois ans plus tard et contestée par une
guerre fratricide (1950-1953), et restée depuis sans traité de paix.
Kim Il Sung au pouvoir a élevé la lutte de libération au rang de
récit fondateur et organisé le pays sur le modèle d'une unité de
guérilla, entretenant la population dans une mentalité d'assiégé
permanent. La résilience de cet «État-guérilla» est sans doute à
chercher moins dans son caractère stalinien que dans un nationalisme
invétéré.
La Corée du Nord évolue cependant vers une économie hybride,
où la frontière entre secteur public et initiative privée est de plus en
plus floue et qui génère de profondes mutations sociales.
Cette évolution interne a pour toile de fond des enjeux géostratégiques
: les risques entraînés par les ambitions nucléaires de
Pyongyang, les visées hégémoniques du puissant voisin chinois et le
retour de la Russie dans le Grand Jeu diplomatique.