S'approprier son corps, faire sienne sa maladie,
garder le lien avec sa vie : c'est tout l'enjeu lorsqu'en
raison d'une maladie grave le corps perd de sa
familiarité, lorsqu'il se manifeste dans son étrangeté,
lorsque les médecins et les soignants finissent
par mieux le connaître et le soigner que nous-mêmes
ou nos proches. Comment, dans ces conditions, rester
soi-même ? Comment regagner sa souveraineté subjective
et narcissique ? La réponse à ces questions
exige d'étudier les processus psychiques à l'oeuvre
dans la maladie grave, et en particulier ceux qui
relancent la subjectivité.
Ce travail d'appropriation signifie, pour le patient,
de subvertir les éprouvés provoqués par la maladie et
les traitements, afin de reconstruire un corps sensoriel
et libidinal auquel il pourra de nouveau s'identifier.
C'est grâce à cette «subversion libidinale»
qu'il parviendra à raconter ce corps, cette maladie,
ces traitements, de sorte qu'ils prennent un sens
dans sa vie et dans son histoire.