Avec Suspiria, en 1977, Dario Argento
marque une étape fondamentale dans
l'histoire du cinéma fantastique. Il a
depuis réalisé le deuxième volet, Inferno
(1980) puis conclu sa «trilogie des
mères» avec La Terza Madre (2007). Des cinéastes, et non des moindres comme John
Carpenter et Brian De Palma, avouent leur admiration pour lui et de nombreux
amateurs lui vouent une sorte de culte.
Italien, fils d'un producteur et d'une photographe, d'abord critique de cinéma, il coécrit
le scénario de Il était une fois dans l'Ouest au moment où les genres hollywoodiens
moribonds viennent chercher en Italie un second souffle. Depuis son premier film
en 1969, L'Oiseau au plumage de cristal, il a principalement oeuvré à l'intérieur d'un
genre, le giallo, récit criminel où la violence se teinte de sadisme, et caractérisé par
des codes immuables, connus du spectateur qui vient y chercher des sensations fortes
et jouir pleinement de sa peur.
Mais loin de rester confinée à l'intérieur de ces frontières, l'oeuvre d'Argento, au
confluent d'influences multiples, tant de la peinture maniériste, de l'art baroque
que des nouvelles vagues européennes, constitue une synthèse entre la modernité
et le cinéma de genre. De la modernité, il a su tirer une audace formelle, le goût
de l'expérimentation ; du cinéma de genre, il a conservé les personnages, criminels,
victimes, enquêteurs, et les récits à base de complots occultes et de rituels
sanglants.
Argento a le goût de la greffe et du métissage entre matières nobles et triviales.
Chez lui, l'opéra côtoie le roman-photo entre chef-d'oeuvre et chromo. La beauté des
films d'Argento ne tient qu'à un fil, à condition que le spectateur croie ce qu'il voit,
qu'il accepte que ses sens prennent le pas sur la raison. Alors, un monde nouveau
et enchanteur prend naissance, le réel révèle une part d'énigme, le spectateur plonge
au coeur d'un cauchemar métaphysique.