Pour l'idéalisme, la conscience humaine est le centre du monde. Pour le matérialisme, le monde réel est premier et l'humain n'est qu'un de ses produits. Face à la philosophie, ce sont souvent les sciences de la nature qui confirment et développent la conception matérialiste de la « nature des choses ». Mais comment caractériser aujourd'hui cette conception en prenant en compte les théories physiques et biologiques les plus récentes ? Et que peuvent dire de plus les philosophes qui ne soit déjà dit par les scientifiques ?
Écrit à quatre mains par le physicien-philosophe mondialement connu, Mario Bunge, et par le biologiste-philosophe Martin Mahner, ce livre montre en quoi peut consister une philosophie matérialiste contemporaine et à quoi elle peut servir. Il constitue une synthèse introductive en même temps qu'un manuel argumenté et quasiment complet de matérialisme émergentiste.
Un tel matérialisme se distingue des autres en ce qu'il reconnaît la diversité des niveaux de complexité et donne une place fondamentale aux notions de changement, de système et d'émergence. À ce titre, il paraît plus apte que d'autres philosophies à promouvoir la nécessaire intégration raisonnée et critique des disciplines scientifiques, des savoirs, des besoins et des intérêts vitaux comme humains dans notre abord des grands problèmes du temps : changement climatique, anthropocentrismes, effondrements des écosystèmes, accentuation du pouvoir des religions et de leurs conflits, replis communautaires ou culturalistes, rejets de la raison et de la complexité, néovitalismes ou panthéismes spiritualistes.
Depuis sa naissance dans l'Antiquité grecque et indienne, le matérialisme non dévoyé a toujours eu des effets émancipateurs en s'opposant aux illusions dominantes. Cet aspect de la tradition matérialiste n'est pas oublié. Les conséquences d'une telle conception de la « nature des choses » sont également explorées à travers une critique renouvelée des croyances et des religions ainsi que dans le projet d'une refondation réellement universaliste - parce que matérialiste - de l'éthique.