Dans Grandeurs et servitudes militaires, Alfred de Vigny définit
les militaires comme appartenant à une «race d'hommes toujours
dédaignée ou honorée outre mesure selon que les nations la trouvent
utile ou nécessaire». Cette vision d'un écrivain qui fut soldat, témoigne
d'une véritable lacune. Le monde militaire qui est pourtant, tant pour
des raisons historiques que géographiques, constitutif de l'identité
française, est intellectuellement méconnu. Pire il est mal connu. Il fait
pourtant depuis longtemps l'objet de nombreuses études historiques
et sociologiques, généralement sérieuses et pertinentes. Indispensables,
celles-ci s'avèrent cependant insuffisantes, tant elles ne rendent compte
qu'incomplètement de cet univers singulier. Il s'ensuit une vision
technique que l'on peut aisément qualifier de réductrice. S'il est en effet
un champ de connaissance qui reste à approfondir voire à explorer, c'est
bien celui de l'approche philosophique de l'état militaire. De fait, il est
fondamental, au sens étymologique du terme. Généralement négligé, il
devrait donc être premier, comme préalable aux autres démarches.
Cet essai n'a pas la prétention de combler une telle lacune. En
revanche, il ouvre la voie, en s'attachant à l'essence de l'exercice de
l'autorité, au travers de la question de la singularité réelle ou supposée du
commandement militaire, dans sa dimension philosophique.
Combinant un intérêt marqué pour la philosophie et une
connaissance avérée des organisations civiles et militaires, l'auteur nous
livre ici une oeuvre originale qui, au travers d'une question essentielle,
invite le lecteur à la libre réflexion philosophique.