De l'amour imaginaire à la plénitude du manque
Il semble n'exister aucune borne à la férocité de l'homme envers son semblable. L'amour, dont on parle tant, ment à longueur de journée. Peut-être parce qu'il recouvre d'une même lumière diffuse la passion érotique, l'attachement, l'amitié et l'amour du prochain tout autant que l'espoir illusoire de toutes nos névroses. Écartelé entre égoïsme et altruisme, je peux établir une relation d'amour avec l'autre en le considérant comme un objet, un miroir, une idée désincarnée ou un sujet de droit. Mais qu'il soit pulsion, fusion, communion ou communication, bien loin d'être un réflexe naturel, le sentiment d'amour est une construction sociale imaginaire qui émerge depuis notre éducation culturelle. En tant que tel, l'amour communicant et respectueux semble se différencier de manière positive des formes névrotiques, romantiques et mystiques de loin les plus répandues qui tentent, à des degrés divers, de combler un manque primordial. Cet essai ambitionne de mettre un peu d'ordre à l'intérieur de ce mot-valise afin qu'il nous serve à voyager vers l'autre avec moins de préjudice et davantage de lucidité.