La vie et la personnalité de Démosthène (384-322 av. J.-C.) ont
toujours fasciné les historiens. Défenseur intransigeant de la
démocratie, patriote fervent face à Philippe de Macédoine, assimilé
à une menace barbare, il aurait voué son oeuvre à servir ces
causes et donné sa vie à la cité d'Athènes puisqu'il préféra se
suicider plutôt que de tomber entre les mains ennemies après
la défaite finale de sa patrie face aux Macédoniens.
Cette vision, qui a longtemps prévalu, notamment dans l'historiographie
française, s'effrite à présent. Des découvertes
archéologiques montrent une Macédoine non point barbare
mais authentiquement grecque ; de nouveaux textes épigraphiques
et littéraires récemment publiés attestent un parti-pris
de Démosthène souvent empreint de mauvaise foi.
En d'autres termes, le moment est venu de faire le point sur
notre connaissance de l'orateur et de l'homme politique,
sans a priori, débarrassé de scories modernes qui ont voulu
faire de lui le porte-drapeau flamboyant d'un nationalisme
sourcilleux ou, à l'inverse, le politicien aveugle incapable de
comprendre le sens de l'Histoire.