Si Hitler et sa politique criminelle avaient triomphé durant la Seconde Guerre mondiale, le public n'aurait jamais plus eu accès aux écrits de Thomas Mann et aux oeuvres de compositeurs aussi célèbres que Félix Mendelssohn, Gustav Mahler, Kurt Weill ou Arnold Schönberg. Le national-socialisme en interdit la publication, l'enregistrement, la radiodiffusion et l'exécution parce qu'ils émanaient d'écrivains et de musiciens juifs ou d'avant-garde. Les quatorze contributions constituant Déracinements racontent ou évoquent le sort terrible, parfois tragique, de ces artistes contraints à l'exil en France, aux États-Unis et ailleurs, quand ils ne furent pas déportés et assassinés à Sobibor comme Alfred Tokayer. Cette galerie de destins permet de relater une histoire de la musique du vingtième siècle bien différente des idées reçues. On y rencontre notamment des personnalités légendaires comme Artur Schnabel ou Theodor W. Adorno, ainsi que Norbert Glanzberg (l'auteur de la célèbre chanson « Padam, Padam ! » écrite pour Edith Piaf), Salvador Bacarisse (réfugié à Paris pour échapper à la répression franquiste) ou Aldo Finzi (espoir de la musique italienne encouragé par Toscanini et victime de la violence antisémite du Troisième Reich).