La belle ouvrage, le Tour de France, le secret... tout l’imaginaire du compagnonnage tient dans quelques pratiques et quelques symboles qui ont focalisé l’attention, épaississant un « mystère » compagnonnique et laissant dans l’ombre les questions qui auraient dû être premières : qu’est-ce qu’être un compagnon ? Comment le devenir ? Et le rester ? Établi à partir d’enquêtes de terrain, de récits de vie et de dépouillement d’archives, cet ouvrage montre les voies qu’il faut emprunter, fait entendre les appels auxquels il faut savoir répondre pour se dire « compagnon du Tour de France ». Car l’auteur, ethnologue, le démontre clairement : l’actualité des compagnons n’est pas une simple persistance. En effet, le compagnonnage est une institution dont la modernité s’est lentement construite depuis le XVIIIe siècle. Simple organisation de jeunesses artisanales vouée à « faire passer » cet âge de la vie dans un premier temps, le groupe compagnonnique a progressivement cherché à façonner de manière plus large l’existence des individus. Institution de passage devenue institution à rites de passage, les compagnons ont peu à peu mis en avant un modèle de vie auquel seule une minorité peut se soumettre : les hommes de Devoir, ceux qui ont su, comme ils le disent eux-mêmes, « faire de leur vie un chef-d’oeuvre ».