Il est bien porté aujourd'hui de penser que nous sommes tous des bourreaux
en puissance et que, placés dans des circonstances extraordinaires, nous serions
capables du pire. On le dit, on le répète, mais on ne s'est pas préoccupé jusque-là de
déterminer si c'est vrai.
C'est ce qu'a entrepris ici Didier Epelbaum. Il s'est demandé comment les régimes
qui ont commis les grands génocides (arménien, juif, cambodgien, tutsi) s'y sont
pris pour recruter leurs bourreaux. Selon quelle méthode ont-ils choisi les hommes
indispensables à leurs projets génocidaires ? Ont-ils puisé au petit bonheur dans
l'immense réservoir de l'ordinaire humain, ou bien au contraire des procédures
très strictes de sélection ont-elles présidé à leur choix ?
Les documents sont là, nombreux, précis, qui permettent de répondre à ces
questions brûlantes autrement que sur le mode de la conviction idéologique. Non,
les bourreaux ne sont pas des «hommes ordinaires».