À l'heure où nous sommes de plus en plus déconnectés des rythmes saisonniers et déboussolés par le changement climatique, le printemps existe-t-il encore ?
Marqueur social et culturel essentiel de notre histoire occidentale, l'« éternel et vert printemps » nous ramène aux origines du monde, à cette nostalgie d'une époque où nous ne faisions qu'un avec la nature, liés par le même ordre des choses. Autrefois temps incompressible des récoltes, des travaux de la terre et des fêtes du cycle pascal, la première des saisons est aussi celle du désir et de l'éveil des sens, de la fertilité et des promesses d'émois. Aujourd'hui, cette saison genrée reste surtout un puissant symbole de renaissance et d'espoir, porteur de luttes sociales et de révolutions politiques. Toutefois, nos représentations collectives de cet entre-deux affectif semblent de plus en plus en décalage avec notre vécu, tant le réchauffement climatique en a transformé les bornes. Le printemps est-il destiné à demeurer silencieux, comme le redoutait déjà dans son livre précurseur la biologiste Rachel Carson en 1962 ?