Les occasions sont rares d'etudier la sculpture antique dans son contexte d'origine, tant le hasard des remplois, destructions et pillages a disperse le materiel arrache a son environnement initial. La sculpture de Thasos ne fait pas exception: volontairement concassees a la fin de l'Antiquite, nombre d'oeuvres ne retrouvent un peu de leur signification qu'a l'issue d'un examen patient et d'un travail minutieux de recomposition. La chance qui a preserve, a des degres differents il est vrai, les elements des ensembles votifs etudies dans ce volume n'en est que plus remarquable. L'attelage forme par ces deux etudes n'est pas que de circonstances. A un peu plus de trois siecles d'intervalle, ces ensembles apportent un eclairage sur des pratiques votives et culturelles meconnues ou mal identifiees. Ainsi, le monument du Dionysion commemore, en dehors du cadre conventionnel des concours, un festival de musique exceptionnel, ou s'illustra la fine fleur des artistes de l'epoque. L'occasion peu commune aiguisa le talent createur de l'atelier attique sollicite, qui choisit des types sortant de l'ordinaire et un mode de presentation sans precedent. Plus modeste plastiquement mais mieux conserve, l'ensemble de statues honorifiques de l'Artemision traduit lui aussi une intention peu banale: il regroupe, dans un petit portique byti pour l'occasion et qui a tout d'une chapelle, les statues de notables thasiennes autour d'une representation de la deesse, adoree dans ce cercle restreint sous une epiclese erudite qui entend tisser un lien, desormais plus imaginaire que reel, avec la metropole parienne. L'obsession du passe se lit encore dans le remploi sous le portique d'oeuvres de la haute epoque hellenistique.

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