Alors que surgit aujourd'hui un désir messianique de faire régner
par la violence une Loi divine transcendant les lois civiles, n'est-il pas
utile de faire retour sur une séquence historique au cours de laquelle
la France subit, du fait de la montée en force d'exclusivismes religieux,
une longue succession d'atrocités et de massacres ?
Tel est le projet qui anime Dieu en ses Royaumes.
Au commencement du XVIe siècle, il y eut le tragique d'une grande
peur de la damnation face à un Dieu toujours plus distant et menaçant.
La fin des Temps approchait et chacun devait se préparer au
face-à-face imminent avec le Christ.
Puis vint l'instant libératoire de l'Évangile restitué, quand Calvin
proposa aux fidèles de vivre dans une «bonne crainte» de Dieu
rompant avec l'angoisse du salut. De sanglantes guerres opposèrent
alors à partir de 1562 «papistes» et «huguenots» dans la violence
extrême d'une lutte entre hantise eschatologique et désangoissement
messianique.
Le pouvoir monarchique tenta d'entraver la crise en se réappropriant
la mission providentielle de maintien d'un ordre de paix civile.
Dieu en ses royaumes raconte donc l'histoire d'un second grand
conflit, qui mit aux prises les rêves apocalyptiques des catholiques
intransigeants avec l'utopie d'un roi Christ. Mais Michel de L'Hospital,
Catherine de Médicis, Charles IX et Henri III rencontrèrent l'échec
lors du massacre de la Saint-Barthélemy et du régicide de 1589.
Toute tragédie a une fin : à travers l'exaltation de la figure d'Henri IV
guidant ses sujets vers un nouvel âge d'or fut légitimée la nécessité
d'un vivre ensemble dans les libertés de conscience et de culte.