Depuis Horace, il se dit que la Grèce vaincue par Rome a soumis le vainqueur par la
force de sa culture. C'est pourtant en latin que, pendant des siècles, les dieux grecs ont été
désignés dans la littérature occidentale : Zeus était Jupiter, Athéna s'appelait Minerve... La
vision d'un monde «gréco-romain» a réduit l'écart entre les deux systèmes religieux au point
de considérer qu'ils se superposaient naturellement et s'interpénétraient spontanément.
Les spécialistes des religions de l'Antiquité s'interrogent pourtant sur les mécanismes de
traduction des dieux «des autres» par les Anciens, sans cependant mettre à l'épreuve de
leurs questionnements les relations entre dieux des Grecs et dieux des Romains. Il est temps
d'enrichir l'étude des polythéismes antiques de ce volet négligé. Comment les Romains
ont-ils accueilli les dieux grecs et qu'en ont-ils fait ? Comment les Grecs ont-ils intégré en
retour des formes de sociabilité religieuse ouvertes aux Romains et à leurs dieux ? Que se
passait-il lorsque les dieux des Romains empruntaient le nom, les épiclèses, les formes, les rites
des dieux des Grecs, et inversement ? Telles sont les interrogations que ce volume collectif
affronte, afin d'éclairer la manière dont les Grecs et les Romains interagissaient entre eux
tout autant qu'avec les «autres», dans le cadre d'une Méditerranée connectée.