La tonalité majeure des Assises est donnée par deux tables rondes
en miroir qui mettent à l'honneur la littérature des Caraïbes,
cet archipel d'Amérique au langage qui "court à travers les
langues anglaise, créole, espagnole ou française, en un point
focal, un lieu de mystère ou de magie où, se rencontrant, elles
se comprennent enfin" (Edouard Glissant). La première table
ronde, animée par Jean-Claude Lebrun, est consacrée à "Traduire
la littérature créole francophone" : en particulier Maryse Condé,
Raphaël Confiant, et Patrick Chamoiseau qui "colonise la langue
du colonisateur", se la réapproprie par l'usage qu'il fait du
créole, lui qui dit aussi : "Lorsque l'ennemi est une nébuleuse, il
ne faut pas seulement résister mais refonder." La deuxième, animée
par Christine Raguet, est consacrée à "La traduction des
écrivains de la Caraïbe anglophone" : V. S. Naipaul, Derek
Walcott, Jamaica Kincaid.
En ouverture, une conférence-causerie de Martin Winckler
qui parle avec chaleur et conviction des trois activités qu'il mène
de front et entre lesquelles les liens sont consubstantiels : "Soigner,
écrire, traduire". Etre à l'écoute d'un patient pour le guérir, d'un
texte pour le traduire, c'est également entrer dans l'univers de
l'autre avec la volonté d'ouvrir grand la fenêtre sur un horizon
commun.
La profession de traducteur littéraire qui réunit l'ensemble des
participants à ces Dix-Neuvièmes Assises d'Arles est abordée
sous plusieurs angles : les aides à la traduction, avec des
représentants du CNL et du réseau RECIT, sous la responsabilité
de Geneviève Charpentier, spécialiste de la question. Et, pour la
table ronde de l'ATLF, bilan des progrès accomplis depuis dix
ans dans le domaine du théâtre avec la "Carte blanche à la
Maison Antoine-Vitez", séance plénière animée par Jean-Michel
Déprats. Les principales questions portent sur la collaboration
entre le traducteur d'une oeuvre dramatique et les praticiens de
théâtre qui la portent à la scène.
Bel hommage de Françoise Cartano à Claire Cayron, membre
fondateur d'ATLAS, suivi de la projection du film qu'Henry
Colomer lui avait consacré en 1994 : Claire Cayron traduit
Miguel Torga. Reprenons la citation de Claire Cayron parue en
exergue de TransLittérature : "Le métier de traducteur est dans
l'oscillation consciente et contrôlée entre prudence et audace : il
faut avoir peur de traduire et cependant traduire. C'est dans
cette oscillation que la traduction est un art, échappant à tout
esprit de système."