Insécurité et peur du crime sont constitutives du fonds de commerce de l'extrême droite. L'insécurité est devenue, en trente ans, omniprésente dans le débat public... Les attentats terroristes ont porté le thème à l'incandescence. La théorie des réfugiés qui tentent de gagner l'Europe accroît encore la tension. Le rejet xénophobe qu'elle suscite contribue à fusionner la peur du délinquant et celle du terroriste dans une crainte de l'immigré. Les territoires où l'insécurité prospère ne sont pas toujours ceux où la délinquance fleurit le plus ; les plus insécures ne sont pas toujours les plus exposés. L'insécurité ne se développe pas nécessairement à cause de la criminalité, mais souvent plutôt à propos d'elle.
Pour s'écarter d'un essayisme flou, les auteurs analysent les données précises sur les peurs et la préoccupation sécuritaire. Sur un tel socle, il est ensuite possible de pointer les mécanismes de l'insécurité et de chercher les couches sociales qui y sont sensibles. Jouer de l'insécurité est d'autant plus tentant pour les politiques comme pour les médias qu'elle a de profondes résonances sociales. La droite - tenaillée par la concurrence de l'extrême droite - hésite de moins en moins à s'emparer de l'insécurité pour en faire un outil de gouvernement. La gauche, faute d'être parvenue à définir une politique efficace de sécurité, s'est réfugiée dans une position assez inconfortable où elle cherche avant tout à échapper à l'accusation de laxisme. Ne voit-on pas s'installer finalement un État sécuritaire ? Dans l'état de fragilité de nos démocraties, n'est-ce pas céder à un jeu dangereux ?