Répétition automatique de mots prononcés par autrui : c'est ainsi que
les scientifiques ont défini, depuis le dix-neuvième siècle, le phénomène
exceptionnel que l'on nomme écholalie, dont l'étude relève, dit-on, de
la psychologie.
Sans se borner à cette acception médicale, Daniel Heller-Roazen donne
à l'écholalie un sens inédit, qui la mène jusqu'à ce seuil où elle se confond
avec le concept même de langage. Dans de courts chapitres, qui tiennent
à la fois de la fable et de l'essai, une seule thèse s'énonce : chaque langue
est l'écho d'une autre, dont elle ne cesse de porter témoignage. Plus radicalement,
chaque langue est l'écho de ce babil enfantin dont l'effacement
a permis la parole.
La démonstration se fait ici à l'aide de textes divers : y participent tour
à tour la mythologie, la psychanalyse, la théologie, la littérature et la
linguistique. D'Ovide et de Dante à Edgar Allan Poe et à Elias Canetti,
des idiomes sacrés du judaïsme et de l'islam aux dialectes en voie de
disparition, de la langue maternelle des poètes aux parlers rêvés des
savants, les vingt-et-une «écholalies» qui composent cet ouvrage tracent
un parcours singulier.
Un livre qui invite à réfléchir sur la nature de cet animal oublieux qu'est
l'homme, dont les langues lui sont continûment dérobées par le temps.