L'homme est bien-aimé. Voici la formule brève anthropologique
de la foi que je tente de développer dans ce livre. L'analyse de cette
formule va aboutir à l'affirmation suivante : l'«être-aimé» n'est pas
seulement la condition de possibilité d'«aimer» - comme l'écoute
est condition de possibilité de la parole - mais il en est aussi la
condition de nécessité : aimé, je ne peux pas ne pas aimer.
À travers ce parcours, je démontre comment cette anthropologie
théologique de l'amour constitue le fondement eschatologique
d'une morale filiale basée sur la connaissance de Dieu-amour, et par
suite sur la connaissance de soi comme bien-aimé. La matrice du
développement est une mystique de la correspondance où l'homme,
comme fils du Père dans le Fils par l'Esprit, correspond à Dieu et
ainsi à lui-même. La thèse morale eschatologique principale de
ce livre est : quand je connais Dieu comme amour, je me connais
comme bien-aimé et fils, et donc je ne peux qu'aimer mes frères.
Une écologie anthropologique de l'amour montre le lien de
nécessité entre l'agapè de Dieu et l'amour du prochain, en passant
par l'amour de soi. Cette fluidité de l'amour se réalise dans la
réception par la foi-abandon - «se laisser faire» par Dieu.