L'enseignement professionnel existe-t-il, lui qui scolarise
aujourd'hui un tiers des lycéens et qui, à bien des égards, est
remis en cause ? A-t-il seulement une histoire, à l'heure où le mot
«professionnalisation» semble être devenu par ailleurs le leitmotiv
de toutes les études ou presque ? À l'évidence, oui - si on
prend soin d'en reconstituer la genèse dès le XVIIIe siècle où il
prend racine dans des considérations religieuses : sauver les
âmes et instruire les ignorants (une des formes de la charité thomiste)
vont alors de pair. Plus encore, dans le XIXe siècle, où cet
enseignement se met très progressivement en place, non sans difficultés
et contradictions, et s'inscrit au coeur de la question
sociale : éduquer les pauvres devient un enjeu économique mais
aussi politique essentiel. Au mitan du XXe siècle enfin, il participe
de la démocratisation de la société française et fait l'objet
d'un débat national sur les «humanités techniques» animé par
de grands noms des sciences sociales (L. Febvre, G. Friedmann,
P. Naville entre autres), en marge de la commission Langevin-Wallon.