Éloge de l'anecdotique
L'anecdotique est le mal-aimé de l'art. Son concept est couramment sollicité pour désigner une oeuvre jugée médiocre, voire mauvaise. Même du point de vue de la narratologie, un récit dit anecdotique sera un récit superficiel, sans grand intérêt. Dans la mesure où il pourrait s'inscrire dans un récit « principal », il n'est supposé donner lieu qu'à des « à-côtés » narratifs, à des récits « secondaires », dont la seule fonction ne serait, au mieux, que l'enjolivement ou la détente.
Le présent essai vise à le réhabiliter et à lui rendre justice en tentant de le redéfinir en lui-même et dans son rapport à son contraire, l'essentiel et ses diverses expressions, l'absolu, l'infini, etc. Il s'efforce de montrer qu'en tant qu'expression idéale du contingent, il se situe du côté de la vie, de sa richesse et de son abondance et qu'à ce titre il a bien occupé une place majeure dans l'art jusqu'à nos jours. Son rejet est un phénomène du XXe siècle, relativement récent, sur lequel on peut s'interroger.