À l'heure qu'il est, 1918, j'ai cinquante ans, j'ai produit environ deux mille tableaux, vingt livres, romans, critique, philosophie dont quelques-uns seulement sont édités, près de mille gravures sur bois et eaux-fortes, plus de cent mille vers, plus de trois mille dessins ; j'ai en outre innové dans le meuble et la tapisserie
J'ai fait connaître Cézanne et Vincent van Gogh. J'ai dirigé plusieurs revues d'art. J'ai parcouru dix nations, visité plus de cent musées, lu un grand hombre d'ouvrages et presque tous les chefs-d'oeuvre. Je n'ai rien épargné pour connaître et faire aimer et défendre le Beau.
Ces quelques lignes résument parfaitement la carrière d'Émile Bernard, dont l'oeuvre peint reste encore aujourd'hui largement méconnu. Cet esprit curieux et profondément religieux s'impose pourtant comme un des théoriciens du cloisonnisme et du synthétisme,à l'origine du symbolisme pictural. À travers cette première monographie, l'historien d'art néerlandais Fred Leeman, avec la participation des descendants de l'artiste, retrace son parcours complexe et analyse ses oeuvres les plus significatives, comme Madeleine au Bois d'Amour, Bretonnes dans la prairie ou Le Pardon, ou encore l'Autoportrait symbolique dit Vision, la Vision d'Égypte et le Cycle humain. Des lettres et textes inédits d'Émile Bernard ainsi que des documents provenant des archives familiales viennent étayer cette étude.