Ces poèmes s'inscrivent dès le début sous le signe du paradoxe : ainsi « On n'oublie rien de ce qui n'a pas été », de ces instants à venir et dont nous ne serons pas les témoins.
Au cours de ce périple poétique, divers thèmes affleurent : la présence de la mémoire, celle de l'oubli, tous deux s'incarnant dans le temps passé, présent ou avenir. Il s'agit donc d'un voyage que les mots dessinent et dont le poète est le témoin involontaire.
Durant cette entreprise, des visages, des lieux surgissent ça et là et les mots sont présents afin de ratifier ce voyage. Toutefois dans cette quête du passé, dans la confiance que l'on peut entretenir envers la mémoire, c'est bien un long voyage que le poète entreprend, un voyage vers des lieux connus ou inventés, un voyage qui permet à la mémoire d'engranger images, souvenirs, visages parfois absents ou disparus. Pourtant dans un même mouvement l'absence est refusée pour permettre à l'espoir de se maintenir en dépit des infortunes que réserve la vie à celui qui la poursuit : « sous la neige s'impatientent les fleurs », une impatience qui fait surgir le désir de ne pas céder au désespoir, de faire confiance à la vie, la nôtre ou celle de la nature.
À la lecture de ces poèmes, en suivant ce chemin de mots « on appelle l'inconnu / d'un nom familier », peut-être pour l'aborder avec moins d'hésitation, de crainte pour conjurer l'absence et ne pas renoncer à l'espoir toujours nommé dans cet itinéraire. Pourtant même si le mot fin se dessine il y a dans ce voyage temporel et dénué de toute précision géographique le refus de cette fin grâce à la présence des mots, leur vitalité, nous préservant de toute absence définitive. Telle est peut-être la raison de recourir à l'écriture, témoin d'un passage, révélatrice de la fragilité humaine mais toujours présente quand on la sollicite pour revendiquer un passage, un espoir jamais abandonné.