Si la jeunesse a joué un rôle important dans la construction des empires coloniaux, elle est également un enjeu essentiel des décolonisations et de leurs suites. Au second XXe siècle, les processus d'émancipation des peuples colonisés posent en effet avec force la question sociale et politique de l'enfance et de la jeunesse en contexte colonial et postcolonial, dans les pays devenus indépendants comme chez les anciens colonisateurs. L'intérêt de cet ouvrage est de mettre en avant les biopolitiques spécifiques aux enfants et aux jeunes qui ont émergé dans un ensemble complexe de questions politiques et diplomatiques, économiques et sociales, démographiques et populationnistes, philosophiques et religieuses. À l'instar des Colonial and Postcolonial Studies, il s'agit d'interroger les cultures postcoloniales et les articulations entre décolonisation et colonisation, notamment les prolongements de celle-ci dans celle-là. Pendant la décolonisation des empires français et belge et la construction de nouveaux États, les enfants et les jeunes ont été sujets de politiques voulues ou soutenues par des biopouvoirs et mises en oeuvre par des protagonistes divers: armées, associations, humanitaires, colonialistes, nouvelles élites, militants, simples citoyens. Les archives publiques qui reflètent les différentes politiques menées ainsi que les sources écrites et orales d'associations ou d'autres organisations permettent de cerner les rôles d'acteurs non-étatiques. Les paroles, plus ou moins critiques, de celles et de ceux qui sont les premières personnes concernées par cette histoire - c'est-à-dire les enfants et les jeunes eux-mêmes - sont bien entendu également mobilisées.