Voici une mise à distance. Syntaxe neutre, réduite, proche des exercices
de langue. Cependant, comme l'écrit Paulhan, «les mots se mêlent de si
près à notre souci de les faire servir que l'on ne distingue jamais très bien
où le souci commence et où finit le mot.» Il s'agit d'explorer la réalité
des choses à travers un microcosme aux figures répétitives mais agencées
différemment d'un poème à l'autre, d'expérimenter des actions, des passages
d'un état à un autre, sous l'apparent arbitraire des faits et de leur
enchaînement. À cela participe la forme, qui n'est pas celle qu'on voit :
des vers justifiés mis en prose. La répétition méthodique des mêmes
états crée un effet d'isotopie, mais les causalités dévient, les mesures
habituelles ne semblent plus avoir cours, être et faire se confondent, les
événements, les choses se comportent sans logique apparente, on s'interroge
sur leur nature. Le plus simplement, comme des évidences, pour
construire un espace (ou ce qu'on pourrait nommer ainsi), tenir un pan
du réel dans la sphère des mots, comme dans une boîte. Et voir en quoi
varier le temps de la représentation (dizains puis douzains) en affecte le
contenu.