Inventée par Rodolphe Töpffer, correspondant de Goethe et de Sainte-Beuve, et même théoricien précoce de son propre média, la bande dessinée semblait née pour devenir un genre littéraire visuel exigeant, apte à raconter des histoires d'une manière totalement neuve. Il a pourtant fallu près d'un siècle pour que la bande dessinée devienne consciente de sa propre existence et qu'on la nomme : illustrés, bandes dessinées, comics,funnies,fumetti, tebeos, historiettas, mangas ou lianhuanhua, selon les lieux et les supports.
Un peu partout, le succès populaire de la bande dessinée s'est accompagné de condescendance, de méfiance ou de mépris. Des générations de collectionneurs et de passionnés ont peu à peu cherché à démontrer les qualités de la bande dessinée, en l'amenant dans les salles des ventes ou les musées, en fondant des clubs ou des revues.
Des auteurs se sont attaché à traiter des thèmes adultes ou importants et à produire des oeuvres d'une qualité artistique impossible à nier, tandis que des théoriciens se sont passionnés pour l'extraordinaire potentiel technique du langage de la bande dessinée. Paradoxalement, ces démonstrations se sont parfois faites au prix d'un dénigrement de la culture populaire de la bande dessinée.