Nous retrouvons la nuit liquide d'avant notre naissance, du temps où nos yeux clos ne nous servaient pas à nous reconnaître, où nos bouches ne se parlaient pas, et où nos mains, nos pieds, nos bras, nos visages, nos genoux, dans leurs tâtonnements muets, suffisaient à nous assurer que l'autre était bien là - du temps où la séparation n'existait pas.
A comme Agadir, B comme Berkeley, C comme Caluire...
D'abord c'est comme un jeu, une proposition ludique qui pourrait s'énoncer ainsi : « Associez à chacune des lettres de l'alphabet un lieu qui vous est familier. Racontez ce qu'il vous évoque. »
Vingt-six lettres, comme autant de miroirs tendus à la mémoire afin d'y capter le reflet de souvenirs dont chacun apporte avec lui la couleur, les odeurs, la lumière d'un lieu particulier. Et le moment qui lui est associé.
L'ordre alphabétique de cette géographie intime bouscule la chronologie en y introduisant hiatus et correspondances. Mis bord à bord, les souvenirs de l'enfance, de la maturité, de la jeunesse, tracent un chemin en zigzag à travers le temps de la vie. Les vingt-six récits courts qu'ils inspirent s'écrivent comme la mémoire, toujours, les conserve - au présent.